Tissons des solidarités face au droit de propriété ! Squatsolutions et Camelot Europe, une histoire de capitalisme urbain

Tissons des solidarités face au droit de propriété ! Squatsolutions et Camelot Europe, une histoire de capitalisme urbain

Si tu possèdes un bien immobilier (un studio, un appartement, un atelier) et que tu le laisses vide parce que « dans quelques années je pourrai le vendre/louer plus cher », ou parce que « je n’ai pas le temps de m’en occuper » ou bien car « c’est compliqué, on n’arrive pas à trouver une solution avec les autres co-propriétaires », il est possible qu’entre-temps des galérien.ne.s y trouvent un abri.

Il arrive souvent que pendant des années des appartements, voire des immeubles entiers, soient laissés vides par leurs propriétaires. C’est à ce moment là que les « junkies » (comme le chef de Squatsolutions aime les définir) entrent en action. Ce sont des migrant.e.s, des chômeu.se.r.s, des précaires, des travailleu.r.se.s, des personnes seules ou avec famille, qui n’ont pas les bons papiers, les bons dossiers pour l’agence immobilière et/ou pas assez d’argent pour payer des loyers désormais exorbitants.

Au fil des années, des agences sont nées pour faire face au « problème » des squatteurs et des squatteuses. Aujourd’hui, les plus connues sont Camelot Europe et Squatsolutions.

Qui est-ce ?

Squatsolutions [https://squatsolutions.com/] se définit comme « leader européen spécialisé dans le rachat de biens en situation complexe ou problématique ». Ils rachètent tout bien immobilier squatté en l’état AVEC les occupant.e.s sans ni droit ni titre. Ils s’occupent aussi de gérer les indivisions conflictuelles.
Yan Collet, le responsable acquisition, a plusieurs collaborateurs : des notaires, des avocats (dont maître Raphaël Richemond et maître Grégory Cherqui), des huissiers de justice (dont maître Alleno), la police nationale, la police municipale, des mairies, des généalogistes, des syndics de copropriété et des pompes funèbres. De plus, des agences immobilières des régions PACA, Auvergne-Rhône-Alpes et Île-de-France lui envoient des dossiers immobiliers placés dans des « situations complexes ».
Squatsolutions travaille uniquement en France.

– De l’autre coté, Camelot Europe [https://fr.cameloteurope.com/] est un spécialiste de biens vacants au niveau international. Ce promoteur permet aux propriétaires de louer leurs locaux temporairement vacants pour pas cher, mais avec plein de contraintes pour les locataires : pas d’animaux, pas de tabac, pas d’enfants, pas de fêtes, pas plus de 18 mois d’occupation. Et un bon nombre d’obligations aussi : signaler tout dysfonctionnement ou toute intrusion illégale, respecter le règlement intérieur, etc. Des visites de contrôle sont prévues tous les mois pour vérifier le bon état du bâtiment. Leur objectif est de surveiller et protéger les biens de leurs clients afin d’éviter que des gens les occupent illégalement. Avec cette démarche, ils permettent de créer de la plus-value sur les biens immobiliers. Leur slogan est « protection par occupation » (bleah !). Ils travaillent aux Pays-Bas (où ça a été créé, en 1993), en France, en Belgique, en Finlande, en Angleterre, en Irlande et en Allemagne.

Comment ca marche ?

Squatsolutions. Après avoir compris qui sont les occupant.e.s, ils commencent des procédures judiciaires pour les expulser. Lors des procès, l’avocat de la boîte cherche à faire condamner les occupant.e.s à indemniser les propriétaires, mais souvent c’est des gens qui ne peuvent pas payer. Ils se chargent aussi de l’obtention de tous les diagnostics indispensables en vue de la signature du compromis de vente.

Camelot Europe. L’agence s’occupe de trouver des résident.e.s temporaires pour les immeubles à louer selon des critères de sélection très stricts. L’offre de résidence temporaire s’adresse à un public cible de travailleurs et travailleuses de tous âges, avec une préférence pour les célibataires. Pour vérifier la fiabilité des postulant.e.s, il y a un entretien où il faut fournir les documents originaux.

Tout ça c’est dégueulasse !

Une autre histoire de chasse aux pauvres et de capitalisme urbain

Si on regardait les choses du point de vue de celles et ceux qui galèrent pour s’abriter plutôt que du point de vue des promoteurs et des pouvoirs publics qui livrent la ville au capitalisme urbain, l’histoire serait racontée d’une autre manière. Dans les faits, les inégalités sont criantes.

Parce qu’ils/elles ont besoin d’un endroit où se loger, les squatteurs/squatteuses essayent de s’installer dans un bien qui est laissé vide par son/sa propriétaire. Souvent, ces mêmes squatteurs/squatteuses ne peuvent pas accéder aux logements sociaux ou aux aides de l’État car ils/elles n’ont pas le bon bout de papier, ils/elles ne remplissent pas tous les critères requis, ou bien parce qu’il n’y a pas assez de place pour loger tout le monde. Et à cause de ce système qui défend le droit de propriété et qui préfère spéculer plutôt que donner un toit à tout le monde, les squatteurs/squatteuses sont le plus souvent expulsé.e.s par la police sans aucune proposition sérieuse de relogement.

Parmi les occupant.e.s des bâtiments vides, certain.e.s squattent non seulement pour des raisons économiques mais aussi par choix politique, pour contrer la spéculation urbaine, pour faire vivre des espaces laissés à l’abandon et pour créer des dynamiques collectives hors du cadre institutionnel. Eux et elles aussi subissent le même traitement.

Face à cela, le squat nous apparaît comme légitime, voire salutaire. Tandis que la possession de (plusieurs) biens immobiliers inoccupés (murés, surveillés, gardiennés) pendant des mois et des années nous semble, elle, ignoble et illégitime, comme toute forme de spéculation.

Au lieu d’essayer d’empêcher tout type d’occupation illégale, il vaudrait mieux réfléchir aux problèmes sociaux existants et à la remise en question du modèle capitaliste et égoïste qui caractérise notre société.

Les entreprises comme Squatsolutions et Camelot Europe font du profit sur la galère des gens et encouragent l’affaiblissement des solidarités entre les personnes.

Il pourrait donc être intéressant de faire signe à ces entreprises cupides, juste pour leur rappeler qu’il ne suffit pas d’expulser les gens pour s’en débarrasser…

Le cabinet de l’huissier Alexandre Alleno se trouve au 39 avenue du président Wilson, 93100, Montreuil.
Celui des avocats Richemond et Cherqui se trouve au 15 rue de Lubeck, 75116, Paris.
L’adresse postale de Camelot Europe se trouve au 46 rue de l’Echiquier, 75010, Paris.

Tissons des solidarités dans les quartiers et ne nous laissons pas faire !

Si le jeu c’est la chasse aux pauvres, nous ne voulons pas jouer avec vous. La seule chasse qui nous plaît, c’est la chasse aux maisons vides !

[Version PDF à télécharger sur squat.net, tract de 4 pages A5.]

 

via Paris-luttes https://paris-luttes.info/tissons-des-solidarites-face-au-11364?lang=fr